textes et poèmes de Jean Esparbié

Textes et poèmes de Jean Esparbié © 2020

 

 

 

 

Texte de Jean ESPARBIE

Sociétaire de l'Académie des arts et des sciences de Carcassonne

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DU CONFINEMENT

De la Genèse à nos jours, de la part mystérieuse de notre création à  maintenant, la Terre subit des bouleversements, des transformations, en somme des corrections comme le brouillon du devoir d'écolier ou tel le manuscrit d'un auteur modeste comme moi. L'oeuvre nous donna finalement le monde que nous connaissons et sur lequel nous vivons, souvent sans le respecter, la plupart du temps avec orgueil et indifférence à l'essentiel. Nous grandîmes en profitant de l'intelligence de quelques uns, mais nous en oubliâmes les vertus et nous perdîmes nos sens dans la "religion" du profit, chaque siècle augmentée jusqu'à cet impérialisme capitaliste écrasant les notions élémentaires de l'humanisme. L'argent reste à la base de toute gouvernance. Il dicte les lois de ceux qui le détiennent. Il fait les princes, les rois, les présidents. Il favorise les progrès. Il active les inégalités. Il souligne le "clan" des riches et le "flot" des pauvres. Avec tu es, sans tu ne vaux rien aux yeux de certains. Aucun dogme, nulle politique ne renverse cela. Les mesures sociales prises par des pays assistent plus ou moins ceux qui en ont besoin, réellement certes, mais avec l'impression d'une bonne conscience et quelquefois pas davantage. Le moindre  "incident" du destin peut te rendre malheureux, t'exclure de la société, te jeter à la rue. Les combats des êtres humains pour le meilleur connurent des drames, des défaites sanglantes et accélérèrent du mieux. Le XIX e siècle, celui de l'industrie, préluda les bienfaits du suivant, endeuillé par deux conflits. Fallait-il ces massacres pour avancer rapidement vers cet horizon que l'on aperçoit toujours fuyant devant nous? Nous volons haut dans l'espace. Nous plongeons au plus profond des mers. Nous discutons d'un bout à l'autre de la planète, directement, en temps immédiat. Nous allons d'une capitale à une lointaine sans nous rendre compte des distances. Nous touchons un bouton et ce que nous voulons accomplir se passe généralement. Nous n'arrêtons pas de sacrifier nos coeurs aux bonheurs d'un matérialisme couronné désormais par l'informatique à laquelle par incapacité, je ne donne qu'un peu de moi. Nous croyons tout savoir et nous ignorons beaucoup. Nous pensons être parvenus au sommet de notre gloire. Nous jurons nos forces à tout maîtriser. Cependant, malgré cela, nous détruisons la nature. Sans elle nous disparaîtrons rapidement, . Nous maintenons la bêtise d'un partage insuffisant. Nous ne voulons pas réfléchir à ce que nous sommes vraiment. Nos valeurs ne sont pas nécessairement à la hauteur de nos certitudes. Les exemples ne manqueraient pas afin d'illustrer mon propos. Patatras! un "sale" virus prouve nos erreurs, nos faiblesses, nos incompétences. Il remet en cause nos comportements. Il met en exergue des attitudes louables, merveilleuses, mais aussi des façons d'être, tristes et condamnables moralement ou légalement. Nous ne savons ni en prévenir la prolongation ni lutter contre lui avec les chances de le détruire entièrement. On ne l'a pas vu venir, celui-ci. Il se répand. Il ravage les corps. Il multiplie les deuils. Il paralyse les pays. Il affaiblit les économies. Il est à la base de restrictions bouleversant les libertés. Il secoue les chercheurs. Il tracasse les dirigeants qui gèrent une situation qui les dépasse, unique, imprévisible, non apprise dans les écoles d'administration et les partis politiques. Il trouble les familles. Il tourmente les plus faibles d'entre nous. Combien de fois les philosophes alertèrent-ils sur les risques courus dans ce monde agité et fou? On les prit pour des "empêcheurs de tourner en rond". Combien de fois les vrais écologistes attirèrent l'attention sur les abus destructeurs de nos biens naturels? On les écarta en souhaitant qu'ils se disputent le droit d'imposer des idées. Combien de fois les salariés et leurs organisations syndicales exprimèrent des revendications quant aux absences de moyens dans les établissements de soins ainsi que dans ceux accueillant des personnes âgées dépendantes? On ne les écouta pas. Comment eussent-ils raison contre une légion de technocrates, armés non plus de règles à calcul  mais de puissants ordinateurs? Les bases "grossièrement simples" ne troublèrent jamais suffisamment les élites intouchables. Les habitants des palais - payés par les peuples parfois au prix du sang- n'entendirent que le "chant des sirènes" des capitalistes, des marchands de canons (le terme est dépassé), des courtisans. Qu'on les laissât tranquilles. "Au diable les donneurs de leçons!" puisqu'ils ne savent jamais la justesse des choses. Nous en sommes toujours à ce point de séparation entre ceux qui ont un pouvoir et les autres, même dans les États démocratiques, même en France. Les bonnes volontés ne suffisent guère afin de diriger un pays. Les années d'études se heurtent aux réalités qu'on ne peut apprendre dans les grandes écoles prestigieuses, mais qui s'enseignent près du quotidien des gens. Les rouages politiques, au sens quelquefois très louable, se perdent dans la course aux responsabilités parce qu'elles abandonnent vite les notions d'humanisme au profit de l'orgueil. La catastrophe traversée suffira-t-elle à entraîner une sérieuse réflexion, une analyse logique et saine sur tout ce que nous avons fait jusqu'ici? Changerons-nous radicalement afin d'exister avec intelligence, d'écarter les superflus, de croire et développer un avenir davantage humain? Comprendrons-nous les modifications indispensables afin de mieux prévoir l'imprévisible et choisirons-nous les moyens qui s'imposeront? Mettrons-nous en pratique la terrible leçon du coronavirus? Écrirons-nous la suite de notre histoire avec sincérité, humblement, dignement, avec fraternité et justice? Espérons-le. Cependant, il faudrait beaucoup de signes pour le croire. Dans l'hypothèse de la continuité de nos bêtises, de nos folies, nous foncerons encore vers les obstacles du destin sans nous préparer à les contourner ou à les abattre. Ah! si nous retenions le meilleur aperçu autour du drame et si nous le développions, nous aurions grandi. Nous vivons la fin d'une ère sans imaginer clairement la suite. Nous avons à présent de quoi ouvrir les regards sur un autre avenir. Résistons et agissons sans perdre notre identité, sans détruire nos bases comme nous l'avons fait sous divers prétextes, sans passer cul par dessus tête, en considérant l'être humain au milieu de tout ce qui nous dépasse et dont nous pourrions profiter respectueusement.

            Il s'agit ci-dessus de la copie de quelques impressions écrites de manière brute - c'est à dire sans correction, sans notion littéraire - le dimanche 29 mars dans mon Journal (cahier N° 89, pages 17640 à 17643).

            Bonne lecture à ceux qui voudront, en cette période de confinement...

Jean Esparbié

 

 

Texte de Jean ESPARBIE

Sociétaire de l'Académie des arts et des sciences de Carcassonne

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Toujours aimer la vie

Michèle CHAPUIS-MAURETTE naquit près de Perpignan, à Saint-Feliu d’Avall. Plus tard, elle habita longtemps au village audois de Caux-et-Sauzens où ses parents exploitaient le vignoble du Clos Saint-Michel. Elle observa et admira le père – Michel MAURETTE – qui écrivait des livres sur la paysannerie avec humanisme, simplicité et talent. Elle croisa nombre de ses amis prestigieux.

Elle devint médecin ophtalmologiste, se maria avec un brillant avocat d’Avignon, cité dans laquelle elle s’installa. A son tour, Michèle CHAPUIS-MAURETTE publia quatorze ouvrages de poésie – la plupart couronnés par des prix prestigieux.Elle dédie à ses parents Toujours aimer la vie, le dernier, publié avec le concours de l’imprimerie PARCHEMIN à Avignon. Là, Les blessures du corps, les blessures de l’âme affrontent le silence, celui des ans, du cœur maintes fois meurtri, de l’esprit soucieux d’ajouter malgré tout l’espoir à chaque jour qui fuit dans le murmure des heures. Dans la noirceur du monde à l’envers, dans la nuit qui vient fatalement, elle s’applique à voir pleurer les premières étoiles sur les victimes des attentats et s’interroge sur les raisons de cette haine : oubli, manque de soutien, orgueil, indifférence ? Cependant, la poétesse aperçoit une étincelle qui jaillit Dans le gris des journées ; sans doute éclaire-t-elle sa petite-fille, son soleil réchauffant des cruelles douleurs. Elle lui redira les phrases de l’arrière- grand-père, nourrissant toujours sa pensée. Elle soulignera les souvenirs qui affluent, tel le vieux pin, dans la cour de la ferme. Il lui disait « Bonjour » quand elle fréquentait le lycée carcassonnais. Montrera-t-elle le bureau étincelant des mots, des livres, des tableaux dans lequel, à chacune de mes visites chez la famille de l’écrivain-paysan, je repense à nos merveilleuses rencontres terminées par le verre de vin cuit apporté par la douce épouse. Sur la pierre du cimetière, Michèle CHEPUIS-MAURETTE offre ses poèmes et entend sans aucun doute les phrases prononcées contre le vent violent au mois de mars 1973 par Jean LEBRAU, le poète de la Corbière. Michel MAURETTE traça un sillon droit et profond où sa fille sème les graines d’amour, plante et soigne de nouvelles vignes d’espérance, en dépit des intempéries folles, des crues d’apocalypses de l’existence partagée avec Fred dont l’éternité ouvre les pages du passé. En feuilletant le miracle de la vie, elle rencontre l’âme de la mère, reconnaît sa voix, effleure sa main. Elle pense à Salvado, le grand-père paternel, Hirsute, harassé, si grand, si solidaire dont l’âne parlait comme un fidèle compagnon. Elle imagine la forge du géniteur de la mère, Le grand maître. Elle observe le papillon qui indique le chemin du rêve.

Et, dans ce recueil, les mots éparpillés caressent le destin que l’on partage avec bonheur auprès de Michèle CHAPUIS-MAURETTE.

Jean Esparbié

Librairie du Parchemin- 18, rue Carnot- 84000 AVIGNON